Co-auteur : Félix Courtine
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L'assurance comportementale, dont les premières applications ont vu le jour avec les véhicules connectés, prend de l'ampleur avec Vitality. Cette offre lancée par Generali à destination des entreprises et de leurs salariés propose des réductions aux assurés adoptant un comportement vertueux. Selon une étude[1], 70% des consommateurs sont prêts à s'équiper d'un objet connecté pour diminuer leur prime d'assurance.
L'assurance comportementale désigne les produits d'assurance qui prennent en compte le comportement des clients dans leur fonctionnement contractuel, via l'utilisation d'objets connectés. La maturité de ces objets, dans le domaine automobile par exemple, a facilité le lancement d'offres « Pay How You Drive », permettant au client de bénéficier d'un tarif modulé en fonction de la distance parcourue et de son comportement au volant.
A partir de la myriade d'informations collectées par les appareils connectés, l'assureur peut réaliser une analyse plus fine des données clients et proposer ainsi une offre mieux adaptée aux usages des assurés : avantage au sein d'un réseau partenaire, services de prévention, entretien de l'objet assuré, tarif modulé à la consommation du client, etc.
Plusieurs lignes métiers de l'assurance sont concernés
L'automobile et l'habitation avec les télématiques (boitier connecté, maison connectée…), la santé et la prévoyance avec les wearable devices (bracelet connecté…), les Entreprises et les Collectivités avec des technologies spécifiques selon les secteurs (ex. : drones pour mesurer l'état des exploitations dans l'agriculture et ainsi faire varier le contrat d'assurance selon leur entretien).
La maturité des initiatives chez les assureurs, tributaires parfois de la régulation, est aujourd'hui très hétérogène.
Tant selon les produits (ex. : l'auto est plus mature que la MRH) que selon les acteurs eux-mêmes (AXA, Allianz et Generali restent pionniers en Europe), voire également selon les pays (l'Italie est le pays le plus avancé dans l'assurance comportementale en Auto, notamment en raison des cas de fraudes !).
L'assurance comportementale est une véritable opportunité pour les assureurs.
C'est en effet un moyen pour eux d'intensifier la relation client, aujourd'hui principalement cantonnée au paiement des cotisations ou à la déclaration d'un sinistre : l'assureur peut se rapprocher de son client lors de moments clefs mesurés par l'objet connecté (dépassement d'un seuil kilométrique en Auto, augmentation régulière de l'activité sportive, …).
L'assurance comportementale permet de proposer des services additionnels qui peuvent être monétisés et ainsi compenser une réduction de la « matière assurable » liée aux modes de consommation à l'usage ; la baisse du nombre d'accidents de la route liée aux voitures autonomes et au développement des systèmes anticollision étant estimée à 80% à horizon 2040, de même que 43% de sinistres habitation pourraient être évités avec les maisons connectées[2].
Enfin, les assureurs ont la possibilité d'affirmer leur position sur la chaine de valeur où des challengers, oscillant entre partenaires et concurrents potentiels, menacent de jouer un rôle prédominant : i. les GAFA (Google, Apple, Facebook, Amazon) qui font de la relation client et l'analyse de données leur cheval de bataille ; ii. les fournisseurs d'objets connectés qui souhaitent proposer des services supplémentaires à leurs clients dans le but de les monétiser (sur le marché automobile, les constructeurs cherchent aussi à apporter des services complémentaires à leurs clients) ; iii. les InsurTech (ex. : Insure The Box ou Metromile) qui veulent désintermédier le marché de l'assurance et accéder directement aux clients finaux.
Dans cet écosystème, l'assureur dispose d'un savoir-faire et d'une place légitime pour instaurer une relation personnalisée et plus fréquente avec ses clients, basée sur 2 principaux piliers :
1) Fournir de façon proactive des services de prévention
Grâce aux données analysées, l'assureur peut proposer des conseils et services préventifs à ses assurés ; les deux parties prenantes ayant un intérêt commun à limiter les sinistres ou les maladies.
2) Proposer une offre d'assurance responsable, intégrant un panel global de services
En garantissant une protection et une utilisation éthiques des données, les acteurs doivent considérer des flux de données plus larges que ceux fournis par les objets connectés, afin de proposer des services à forte valeur ajoutée dépassant la sphère assurantielle et traversant différents secteurs d'activité.
Plusieurs initiatives peuvent permettre aux assureurs de répondre à ces enjeux.
L'animation d'une offre de service permettant une personnalisation de la relation.
En effet, l'offre assurantielle doit être complétée par des conseils et services, définis à partir des données de comportement analysées par l'assureur. Par exemple, trouver un revendeur pour son véhicule au bout de X km, obtenir des conseils de santé, des réductions dans des salles de sport, etc. Cela nécessite de construire et faire vivre un réseau de partenaires, permettant à la fois de collecter les données des assurés et de capter des revenus additionnels (les rétro commissions liées au volume consommé par le client de l'assureur). Les acteurs doivent en outre veiller à une communication abondante, éthique et axée sur les services proposés, afin de maximiser le taux d'adhésion de leur offre et éviter une perception discriminatoire des clients.
La mise en œuvre d'une plateforme partagée par les Métiers pour gérer les données Clients.
En effet, le traitement des données comportementales demande aux assureurs de faire évoluer leur système d'information et les compétences des collaborateurs pour optimiser l'offre de service. Cela passe par des investissements dans les infrastructures IT, plateformes construites en interne ou externalisées, qui facilitent le partage d'informations et garantissent la protection des données. Cela requiert également le recrutement ou le développement de nouvelles compétences, principalement dans les domaines IT et actuariels (ex. : data engineers, data scientists, architects, data managers, …). Un accompagnement approfondi des métiers dans l'utilisation de la plateforme reste par ailleurs incontournable pour rendre ces outils efficaces.
Le pilotage d'un modèle économique repensé et rentable.
En effet, la cohabitation de l'activité traditionnelle de l'assureur et du passage à un mode de fournisseur de services nécessite de reposer les indicateurs économiques clefs. L'amélioration du pricing des polices d'assurance, les revenus des services proposés avec des partenaires, une détection de la fraude plus performante, mais aussi les coûts d'infrastructure IT et les efforts de communication clients sont autant d'éléments à prendre en compte dans le business model de l'assurance comportementale. Le pilotage de ce nouveau modèle sera dûment réalisé par les acteurs qui, dans le contexte actuel de taux bas, devront maximiser les initiatives profitables.
En conclusion, l'assurance comportementale est une opportunité pour les assureurs. L'adoption d'une approche « Test & Learn » pour explorer de nouveaux terrains de jeu est vertueuse. L'idée d'une assurance à la mobilité plutôt qu'une assurance auto traditionnelle pourrait être étudiée, de même qu'une nouvelle offre MRH comportementale, quasi inexistante à ce jour sur le marché. Les précurseurs devraient être récompensés : ceux qui acquerront rapidement une expérience des usages clients, de la tarification et des partenariats, via le lancement de PoC et de pilotes, seront en mesure de déployer plus vite une offre de service innovante et rentable.
[1] Etude mondiale de Forrester Research, 2015
[2] Argus de l'Assurance, 13 mai 2016, Dossier Auto et habitation connectées
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